L’anxiété nous ronge continuellement, retraités comme actifs. Pourtant nous les anciens, devrions être habités par une perpétuelle bonne humeur. Que craignons-nous en fin de compte hormis une fin de vie un peu rock’n’roll ? On a tout l’avenir devant nous avant d’y penser (hum !). Se complairait-on dans le stress ? Je suis persuadé que non. Les questions fusent. Quelle vie auront nos petits enfants ? L’IA va confisquer le job de ma fille. Le Covid resurgira à un moment donné. La guerre en Ukraine va se propager à l’Europe, etc. L’être humain évolue constamment en tout temps et en tout lieu. Croire l’inverse est une thèse qui occulte les souffrances morales que nous subissons et que les populations des siècles passés ne connaissaient pas. On nous oblige à tout comptabiliser et cela nous l’avons intégré depuis des lustres. En fait pour nous le réel est ce nous pouvons gérer, manipuler, classer, mettre en fiches. On préserve les forêts parce qu’elles rejettent des tonnes d’oxygène. Un bœuf représente beaucoup de protéines, de calories, il est donc impératif d’en maximaliser le rendement. En poussant un peu plus le raisonnement on s’aperçoit que nous-mêmes, sommes ou étions des convertisseurs d’énergie en produits de consommations donc des ressources devant être gérées pour en tirer le bénéfice maximum.
On est bien loin de l’humanité d’avant la révolution industrielle qui voyait la main de Dieu dans toute création. C’était plus cool de ne pas être rationnel. Bref on dirait maintenant, « que des feignasses ».
Aujourd’hui quand tu bosses on te demande de te manier et pour cela, de gérer ton stress. C’est bien la démonstration que t’es fautif. En réalité on est à la botte de gestionnaires voulant obtenir de nous le max de rendement comme pour le bœuf. Pas de pitié, quand faut y aller, faut y aller, ce sont toujours les mêmes qui poussent. T’as pas remarqué que celui qui gère les hôpitaux gère quelques temps après la RATP ou l’EDF ou encore Renault ? La spécificité n’existe pas chez eux et il faut leur ressembler. On doit avoir ce rapport de gestion à soi-même ce qui veut dire qu’on doit absorber le poison qui est en train de nous flinguer. Le pire c’est qu’ils y arrivent et on est proche de la mithridatisation. On ne marche pas, on court. Tiens l’autre jour je ne pouvais plus faire un pas (faut bien que vieillesse se passe) et bien figurez-vous que ce qui me faisait le plus mal, ce n’était pas la douleur physique non, c’était de ne plus pouvoir faire les cinq mille pas que me commande mon Samsung Health et de ne pas recevoir en récompense sur mon écran une pluie de pétales de roses. C’était aussi ne pas connaître la quantité de Kcal brûlées, alors que toute une communauté s’était acquittée de sa tâche quotidienne. J’étais un marginal. Même à la retraite on nous fout la pression. Tout est devenu compétition d’où le stress généré.
Bon, j’exagère un peu mais nous sommes prisonniers de cette obsession de rentabilité d’une manière qui, parce qu’elle est inapparente ne nous permet pas de nous y opposer. Le simple bonheur d’être, de faire, de s’accomplir disparait. Une sagesse qui ne prend pas en compte notre réalité historique loin de nous aider ne peut que nous détruire et c’est exactement ce qui est en train de se passer. C’est pour nous apprendre à nous poser des questions toutes simples que nous avons besoin aujourd’hui de philosophie.
Bon faut que j’y aille, je vais encore être en retard.
DS