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Edito

Déboulonner les statues, un mea culpa ?

Aujourd’hui, l’acte de contrition permanent poussant la France à s’excuser publiquement de son passé colonisateur qui avait fait d’elle le deuxième empire après l’Angleterre ne suffit plus à éteindre une rancune devenue pour beaucoup, haine. La vision criminelle de ce passé vient maintenant se renforcer avec l’iconoclasme. Doit-on se rassurer par le fait que la France n’est pas la seule nation visée par cette attitude d’hostilité envers des valeurs que l’on prenait pour sacrées. Déboulonner les statues sert pour les puristes à décoloniser les arts. Ils réclament une justice mémorielle. Le fait n’est pas nouveau. Les actes iconoclastes jalonnent l’histoire et ils correspondent souvent à des actes institutionnalisés. Ainsi la statue du général Lee met en jeu plusieurs tensions, comme celle de Cecil Rhodes, grand acteur de la colonisation britannique et défenseur de la race Blanche ; à Bristol, la statue d’Edward Colson, célèbre marchand d’esclaves, a été renversée par un groupe de citoyens, le 8 juin 2020. En France, la statue de Colbert placée devant l’assemblée nationale a été taguée par des militants. Ici l’iconoclasme concerne des faits politiques que dire des faits religieux. Des pratiques proches concernent des statues représentant les dieux des Romains dans un contexte où la religion chrétienne s’affermit pour devenir religion d’État et où l’Église affiche clairement son aversion pour l’idolâtrie. Plus près de nous la guerre d’Espagne à été un véritable exutoire face à la religion, (pillage des églises, destructions des œuvres relevant de l’art sacré, etc.).

La société évolue, elle veut tendre vers le bien absolu, sauf qu’elle oublie que ce qu’elle est aujourd’hui elle le doit à son passé qui même peu élogieux selon notre vision actuelle, a créé une expérience menant à la critique comme aux condamnations d’actes fédérateurs à l’époque. On ne peut juger que ce que l’on compare. Bien des héros d’hier sont des parias aujourd’hui. Nul n’est besoin d’encenser toutes les périodes qui ont fait notre histoire, mais elles existent et les occulter serait une erreur. Déboulonner les statues est un épisode qui cumuler à d’autres, petit à petit conduiront à des autodafés d’œuvres magistrales écrites par des Céline, Brasillach, Drieu La Rochelle etc. Bien sûr, la justice mémorielle montre que les images placées dans l’espace public sont aussi une affaire collective, qu’elles méritent d’être questionnées, discutées, déplacées ou réaménagées comme l’est actuellement la statue de Joséphine de Beauharnais à Fort-de-France. Décapitée à plusieurs reprises par des activistes rappelant qu’elle fut un cadeau à celle qui agit en faveur du rétablissement de l’esclavage. Elle témoigne d’un passé qu’il ne s’agit pas de faire disparaître. Mais alors pourquoi l’histoire ne serait-elle pas touchée aussi par ce phénomène actuel ? Pourquoi encore enseigner les guerres napoléoniennes ? Hitler s’en étant largement inspiré.

Les actions iconoclastes se passent de toute démarche juridique, toutes entendent bien faire œuvre de justice. Mais à vouloir le bien absolu ne risque-t-on pas de sombrer dans une société aseptisée et faible capable de nous entraîner à travers un pacifisme aveugle vers un nouveau grand conflit ?

DS

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