Qui, une fois dans sa vie, n’avait pas embarqué dans ce vaisseau où grondait encore le ressac de tant de siècles où flottaient toujours les oriflammes dressées par tant d’heures mémorables et dans lequel demeurent suspendus les échos de tant de Te Deum et de paroles sublimes ? Qui n’avait pas arrêté ses pas dans cette aire lumineuse érigée par des mains miraculeuses où la générosité la plus lointaine, la plus diverse confond ses affluents pour donner naissance à la plus profonde humanité ? L’homme de peu de foi, par la magnificence de l’édifice, titubait et sa non croyance vacillait. Dans ce vaisseau Hugo y avait fait embarqué Quasimodo et Esméralda, voyageurs éternels ravissant la littérature.
Notre Dame de Paris lieu des arts et des lettres, était la convergence de toutes les lumières des siècles et des astres à travers la polychromie du verre, de l’art pictural et musical. C’était dans sa nef que se cristallisait l’âme entière de l’humanité. Elle était partout à nos yeux, l’ouverture à la magnificence, l’endroit où les cœurs battent pour les âmes apaisées, l’endroit où ombre et lumière se confondent, où la musique est respiration, l’endroit de l’oubli et de l’abandon, l’endroit où vice et vertu ne sont plus valeur morale, l‘endroit où vie et mort ne sont pas plus thèse qu’antithèse. On voyait dans ce lieu magique le ferment de la pensée haute. Le génie de l’homme avait été de savoir matérialiser cet éternel présent qui mène notre destinée au travers des arcs-boutants, des piliers, des colonnes, des arcs brisés, des clefs de voûte, tout ce qui n’est que force et résistance. La magie s’opérait aussi dans ces musiques venues du fond des âges que l’homme a su capter pour envelopper de sons les formes, les couleurs et les espaces sacrés. On a appris qu’à la libération de Paris, les grandes orgues libérèrent un Magnificat, et que ce jour-là il n’en fut pas joué de plus beaux.
Cette cathédrale portait toute la signification d’un vers de Lamartine « L’homme est un Dieu tombé sur terre qui se souvient des cieux ». Elle symbolisait la communion de l’âme et de l’art et de ce lieu on en faisait sa patrie.
Notre Dame de Paris avait franchi les Ages, elle cinglait lestement vers l’éternel quand le XXI ième siècle la stoppa. Notre Dame de Paris n’appartenait pas à Paris, ni à la France et pas même à la Chrétienté, elle appartenait au cœur de cette humanité désireuse de tolérance et de paix.
Aujourd’hui poudre cendreuse, deviendra-t-elle le Phoenix des temps modernes ?
Dominique Sidrac
Cliquez sur la photo pour lancer le Magnificat.