
La lecture peut-elle être encore une activité qui occupe nos loisirs ? la lecture, la vraie, pas celle des magazines où prédominent les photos. Je parle des auteurs aussi bien classiques que contemporains. La lecture est un effort intellectuel du début à la fin. Elle nécessite reconnaitre des lettres, les assembler, lire les mots qu’elles forment, les comprendre, les associer à la phrase, etc. J’arrête ici pour ne pas décourager ceux qui voudraient s’y mettre. Oui, lire demande une concentration de l’esprit. Le temps d’adaptation passé, se crée une dépendance. La même que celle ressentie par les joggeurs en mal de courses. La lecture devient alors un réel plaisir. Mais pour cela il faut commencer par lire. Or selon les experts, on ne lit plus, on « écoute des contenus ». À croire qu’avoir un livre entre les mains devient une activité réservée aux intellectuels impotents ou à ceux que l’informatique a laissés de côté. Peu à peu la lecture se transforme en audiolivres, podcasts ou autres applications numériques. On a tendance à oublier que la lecture, socle de notre culture, permet notre intégration dans la société tout en nous laissant notre libre arbitre. Comme dit précédemment, pour ça, il faut lire mais par soi-même.
« Si j’ai un livre pour me tenir lieu d’entendement, un directeur pour ma conscience, un médecin pour mon régime… Je n’ai pas besoin de me fatiguer moi-même. Je n’ai pas besoin de penser, pourvu que je puisse payer ; d’autres se chargeront à ma place de ce travail fastidieux. » disait Kant.
Il enjoint les citoyens à exercer leur jugement par eux-mêmes, à ne pas se contenter des préjugés ou d’un état de tutelle. Il faut ‘’sapere aude’’ (oser savoir), penser par soi-même. Les individus peuvent alors comprendre et critiquer les lois et les institutions qui régissent leur société, afin de les transformer, en exprimant leurs opinions publiquement.
Différents systèmes de lecture s’offrent aux jeunes aujourd’hui, livres numériques, livres audios ou podcasts. Ces modes de lecture ne sont pas si mauvais à condition de ne pas se laisser happer par les IA. Cette facilité de demander à ChatGPT de nous raconter un livre est tentante mais dangereuse. Dans cet ordre d’idées, il faut savoir que les IA ne sont pas neutres et qu’il est très facile de se faire embarquer subrepticement vers des idéologies que nous rejetions alors. Les lavages de cerveaux ne sont pas loin.
Il ne s’agit évidemment pas de revenir aux Lumières : nous ne sommes plus à l’époque du livre, ni même à celle des industries culturelles mais il est nécessaire de réactiver une attitude critique à l’égard de notre actualité. Le livre classique nous laisse le temps de la réflexion et de la délibération.
Lire est une expérience intime, ce ne doit pas être une consommation rapide sur écran, scrollable et éphémère sans compter que chaque lecture pourrait être tracée, analysée, exploitée. On finirait par ne plus lire en totale liberté, mais sous l’œil d’un grand frère numérique.
Si on veut échapper à l’emprise des IA sur notre façon de penser, la lecture de livres papier est un moyen nécessaire cependant je n’irais pas jusqu’à dire, et suffisant.
DS
