Edito

Septembre, la rentrée des classes

 

Quelques fois dans un tiroir oublié, nos doigts font resurgir une vieille photo de classe jaunie sur laquelle est figée à jamais la petite écolière ou le petit écolier que nous étions il y a bien des années.
Passer notre mémoire à travers cette petite fenêtre ouverte sur le passé, nous fait retrouver des instants, des couleurs, des odeurs que nous pensions enfouis à jamais. Le premier réflexe conduit souvent à faire le bilan des personnages présents sur l’épreuve. Untel ou unetelle n’est plus ; que sont devenus ceux-là ? La vie les a écartés de notre route.
Cette photo de classe suscite quantité d’observations sur nos modes de vie, sur le modelage du temps sur nos carcasses. Elle a un impact affectif auprès des élèves anciens ou actuels, des parents, des enseignants. S’attarder sur l’image fait petit à petit renaître les détails cachés dans notre mémoire ; les noms reviennent souvent en voyant la photo ; « ce jour-là nous étions environ une quarantaine et pour l’occasion, vêtus des habits du dimanche, c’était au printemps et il y avait encore quantité de neige. Lui, c’est Paul, il avait pleuré parce qu’on l’avait contraint à se faire photographier. Elle ? c’est Denise qui pleurait chaque fois que la pluie se mettait à tomber ; Celui-là ? c’est cet instituteur peu avare des coups de règles infligés aux mains pouponnes ; ici c’est Roby le pauvre, qui a été tué par une voiture quelques années après la photo ; elle ? c’est Hélène, elle était jolie, je lui avais écrit un petit poème et elle avait ri … »
Se faufiler à travers cette petite fenêtre est un moment délicieux qui nous replonge à l’époque du primaire, cette période où nous usions nos fonds de culotte sur ces vieux bancs durs tachés d’encre noire, bleue, rouge, solidaire des pupitres portant multiples gravures, ‘’Delphine aime Dédé’’, ‘’m…. à celui qui le lit’’, ‘’21.12.1805 sacre de Napo’’ etc. Viennent s’enchâsser dans notre vision les odeurs d’encaustique, de vieux livres, les bruits typiques comme le crissement de la plume sergent-major frottant le fond de l’encrier blanc en céramique, le coup de sifflet mettant fin à la récréation, le claquement des sabots sur le plancher grinçant. Voilà les petits miracles que produisent ces photos que l’on pense banales, elles nous offrent des moments extrêmement chaleureux qui suscitent le regret d’être passé à côté d’une telle richesse si longtemps. Si la nostalgie ponctue nos réminiscences elle le fait sans tristesse, elle nous rend quelques heures d’une jeunesse heureuse.
Si institutionnelle qu’elle soit, la photo de classe n’est finalement pas si figée, elle se prolonge en nous, en ce que nous sommes devenus. Elle est le fruit d’une relation et les enfants le sentent bien. A bien y regarder ne serait-elle pas un petit miroir du futur ?
DS

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